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La régie du domaine de Saché

HONORÉ DE BALZAC EN TOURAINE

 

 

Du garde-champêtre au régisseur

En 1789, après l’obtention de son divorce d’avec Jean Buttet, Perrine Poulet engage Claude Brunet pour assurer la garde du domaine de Saché. Claude Brunet reste en fonction jusqu’à son décès en 1816, alors que le domaine appartient depuis quatre ans à Jean et Anne Margonne. D’après Jacques Briau, son successeur : « les archives de la terre » étaient « dans un désarroi complait [sic], pour la mettre en ordre il m’a fallu passer près de deux ans »[1].

Jacques Briau est un jeune arpenteur-géomètre recruté par Jean Margonne sur recommandation de son précédent employeur. Il venait de participer à la réalisation du cadastre napoléonien à Azay-le-Rideau, Cheillé et Thilouze. Ses compétences lui permettent d’établir rapidement un « Atlas de la Terre de Saché », daté de 1820. Bien intégré dans la vie locale, Jacques Briau est de ce fait « souvent appelé dans toutes les communes, soit pour faire des plans, soit pour instruire des difficultés entre propriétaires et des bornages entre riverains »[2].

 

Un digne logement de fonction

Comme l’indique Jacques Briau, M. Margonne lui « avait donné pour logement l’ancien presbytère adjacent à son château […] Après avoir habité dans une si petite maison, nous devions aller habiter dans un château, notre métamorphose était grande »[3]. Il s’y installe fièrement, avec sa femme et sa sœur. Selon lui,  sa sœur, « en grandissant à Saché prenait des manières tout affait [sic] agréables, les dames du château se faisaient un vrai plaisir de causer avec elle »[4].

Après six ans passés à Saché, il reprend ses activités au cadastre après avoir consciencieusement transmis ses conseils à son successeur, Virgile Pertuis : « Un mois avant mon départ, M. Perthuy [sic] est venu chez moi pour que je le mette au courant des affaires et lui faire connaître la propriété »[5].

D’après le premier recensement de la population de Saché en 1836 [6], Virgile (36 ans) et Anne (30 ans) Pertuis, vivent dans le logement voisin du château avec leurs deux enfants, Joséphine (5 ans) et Eugène (3 ans). Virgile Pertuis reste au service de M. Margonne jusqu’à son décès. Ce dernier, reconnaissant, prévoit dans son testament un legs de vingt mille francs « en récompense des soins qu’il a donnés à mes affaires depuis cette époque »[7].

 

Balzac « le romantique »

Balzac n’évoque jamais Virgile Pertuis dans sa correspondance. En revanche, le célèbre écrivain semble avoir été le sujet de moqueries entre le régisseur et M. Boullet, un ingénieur hydraulique intervenant sur l’un des moulins du domaine, qui écrivait en 1834 :

« Je me proposais de réparer un oubli en vous demandant des nouvelles du romantique : va-t-il souvent rêver au clair de lune au pied des chênes et des hêtres à l'aspect sinistre ? Rendez-lui donc le service de lui indiquer, si vous ne l'avez pas déjà fait, la grotte de la Madelaine qui est au bas de la cascade du château, ce sera pour lui bonne fortune, il ira là méditer sur les misères humaines en observant la chute des feuilles par un jour brumeux d'octobre pendant que vos vendangeurs plus gais rempliront des tonneaux d'un certain jus pour lequel vous n'avez, ainsi que moi, guère d'antipathie »[8].

 

Christelle Bréion (musée Balzac, Saché)




[1] Mémoires de Briau-Bodin, manuscrit conservé aux AD37 sous la cote 1J1348.

[2] Ibid.

[3] Ibid.

[4] Ibid.

[5] Ibid.

[6] Les listes nominatives par commune et par famille ont été établies à partir de 1836, tous les cinq ans, en application de la circulaire du ministre de l'Intérieur du 10 avril 1836 précisant que « le recensement à faire dans chaque commune doit comprendre les individus de tout âge et de tout sexe, habitants ou domiciliés dans la commune, même ceux qui en seraient temporairement absents. Le tableau nominatif doit être établi par famille ou ménage ».

[7] Archives privées.

[8] Extrait d’une lettre de l'ingénieur Boullet à Virgile Pertuis, Tours, mars 1834, conservée aux AD37 sous la cote 112 J 60

 

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